Ma bonne résolution de l'année, c'est de reprendre sérieusement mon Tour du monde, car j'ai une PAL d'une soixantaine de pays qui ne demandent qu'à être parcourus. Le mois de janvier est donc placé sous le signe de la République Démocratique du Congo, qui sera le quarantième pays de ce voyage.
Depuis qu’il a découvert l’Internet et la mondialisation, le jeune Isookanga, Pygmée ekonda, n’a plus qu’un objectif : planter là les cases, les traditions, les ancêtres et la forêt millénaire pour aller faire du business à Kinshasa. Il débarque donc un matin dans la capitale, trouve l’hospitalité auprès des enfants des rues et s’associe avec un Chinois qui fait commerce de sachets d’eau potable. L’avenir est à lui !Pendant ce temps, à Kinshasa et ailleurs, le monde tourne moyennement rond : des seigneurs de guerre désœuvrés aux pasteurs vénaux, des conseils d’administration des multinationales aux allées du Grand Marché, les hommes ne cessent d’offrir de preuves de leur concupiscence, de leur violence, de leur bêtise et de leur cynisme.Qui sauvera le Congo, spolié par l’extérieur, pourri de l’intérieur ? L’innocence et les rêves, les projets et la solidarité.
Nous avons ici un roman assez court, le français est la langue originale, ponctuée d'autres langues nationales, mais aussi d'expressions typiquement congolaises : les notes de bas de page sont bienvenues pour ne rien perdre des dialogues. J'ai adoré le style, que j'ai trouvé très vivant et qui nous plonge immédiatement dans l'histoire. La majorité du roman se passe à Kinshasa, qui est, rappelons-le, la plus grande agglomération francophone du monde.
C'est en quelques sortes un "roman de la mondialisation", avec tous ses travers. Et quoi de mieux pour l'illustrer que "Raging trade", un jeu vidéo fictif à travers lequel le personnage découvre la mondialisation et qui illustre la trame principale. J'ai trouvé que c'était une super idée.
Le personnage principal est amusant et attachant (même si c'est un c**** de capitaliste assumé !! vous apprécierez le tour de force), son parcours nous amène à découvrir une kyrielle de personnages très divers qui croisent sa route à un moment ou un autre : un criminel de guerre, un Casque bleu corrompu, une enfant prostituée, un enfant soldat, des enfants des rues sans famille... Chaque chapitre se concentre sur l'un d'entre eux.
Le roman alterne très habilement les passages au ton léger (quand bien même les personnages ont la vie dure) et qui me faisaient souvent éclater de rire (qui a dit que la lecture, c'est morne et calme !!), et les passages beaucoup plus durs à lire, qui décrivent les violences qui ravagent le pays, notamment le génocide du Rwanda, pays frontalier avec la RDC et qui a aussi affecté son voisin - ce que j'ignorais. C'est donc l'ascenseur émotionnel tout du long, ce qui contribue à rendre ce bouquin marquant.
J'ai envie de mettre une petite citation qui illustre je trouve très bien le style, l'humour... C'est l'extrait d'un prêche d'un révérend sur Sodome et Gomorrhe (j'ai adoré ce personnage - lui aussi horrible - il m'a fait rire tout du long.)
"Dieu n'est pas le pape, mes bien-aimés. Lui, il n'attend pas qu'il y ait prescription."
Ça, c'est du prêche ! Si tout le monde nous racontait la Bible comme ça... (ouais, non, ça risquerait de faire des remous !)
Forcément, le livre parle aussi des organisations humanitaires, et n'en donne pas une vision hyper positive, un discours qu'on n'entend pour ainsi dire jamais en Occident. Cette critique est couplée à une critique du capitalisme ici poussé à outrance et qui fait le malheur du pays, or le livre nous rappelle que ces organisations humanitaires sont elles aussi au service de la mondialisation.
L'épilogue est aigre-doux et fait le bilan des drames du Congo depuis la colonisation par les Allemands (d'où le sous-titre). C'est un happy end pour le personnage principal, mais il laisse présager une catastrophe écologique imminente.
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Une étape de mon tour du monde |